La question posée dans cet arrêt est la suivante : Est-il possible de licencier un salarié qui revient d’un arrêt maladie pour des faits commis lors de sa reprise alors que sa visite de reprise n’a pas eu lieu, peut-il utiliser son pouvoir disciplinaire ?
En l’espèce, une salariée est mise à pied conservatoire et convoquée à un entretien préalable, lors de son 1er jour de reprise du travail et, ce après un arrêt-maladie de plusieurs mois.
L'employeur lui reproche des faits qu’elle aurait commis le jour de sa reprise, et par conséquent, il lui notifie 14 jours plus tard un licenciement pour faute grave (elle reprend son poste en recréant auprès de son équipe un climat anxiogène déjà signalé, en modifiant le planning mis en place pendant son absence, sans échanger avec son équipe).
La salariée conteste ce licenciement pour faute grave et soutient que l'employeur ne pouvait faire usage de son pouvoir disciplinaire du fait de la suspension du contrat de travail et demande que son licenciement soit déclaré sans cause réelle et sérieuse.
Pour rappel, dès que l’employeur a connaissance de la date de la fin de l'arrêt de travail, il doit saisir le service de prévention et de santé au travail (SPST) afin que celui-ci organise la visite. Celle-ci doit avoir lieu le jour de la reprise du travail et au plus tard dans un délai de 8 jours suivant le retour au travail du salarié (article R4624-31 du code du travail).
La jurisprudence est également constante sur ce sujet, le contrat de travail reste suspendu jusqu’à la visite de reprise.
En pratique, il est fréquent que le salarié reprenne son travail à l’issue de son arrêt de travail et soit rémunéré à ce titre, alors qu’il est toujours considéré comme étant en période de suspension du contrat de travail.
La cour d’appel déclare le licenciement pour faute grave est sans cause réelle et sérieuse du fait le contrat de travail était toujours suspendu.
La cour de cassation censure la décision d’appel et rappelle que « le salarié dont le contrat de travail est suspendu pour maladie et qui reprend son travail avant d’avoir fait l’objet de la visite médicale de reprise est soumis au pouvoir disciplinaire de l’employeur ».
Le salarié en l'attente de sa visite de reprise, mais qui reprend le travail, reste donc soumis au pouvoir disciplinaire de l'employeur et s'expose à un licenciement en cas de manquement à ses obligations.
Mais si l’employeur manque effectivement à son obligation d’organiser la visite de reprise au retour du salarié, alors la situation est différente et l’usage du pouvoir disciplinaire restreint.
Dans ce cas, la Cour de cassation considère que « l’employeur peut seulement dans le cas d'un licenciement disciplinaire reprocher au salarié, dont le contrat de travail demeure suspendu, des manquements à l'obligation de loyauté » (Cass. Soc. 16 octobre 2019, n° 18-19893).
- Cass, soc, 16 octobre 2024, n°23-14.892