par Maître Charles BOHBOT, Avocat à la Cour et membre du Think tank du droit immobilier
La clause qui stipule que les appartements à partir du 1er étage devront toujours être habités bourgeoisement permet-elle de lutter contre la location saisonnière dans les étages ? Le fait d'installer un système d'alarme pour limiter le bruit permet-il d'éviter une condamnation ?
« Les activités commerciales sont donc expressément prohibées dans les appartements situés à partir du premier étage de l'immeuble, en ce compris le lot n°4 propriété de la société SQLF ;
Or, il n'est pas contesté par la société SQLF, qu'elle exerce dans les locaux qu'elle a acquis situés aux premier et deuxième étages de l'immeuble, une activité commerciale de location touristique meublée de courte durée (…)
Les nuisances sonores émanent bien de la location Airbnb et l'installation d'appareils de surveillance des niveaux de bruit, telle qu'elle ressort de la pièce 12, 'cet appareil surveille les niveaux de bruit à l'intérieur de l'appartement en temps réel, envoyant des alertes lorsque les valeurs autorisées sont dépassées' outre le service 'alarm' qui avertit les locataires en cas de bruit excessif, n'apparaissent pas suffisants pour les éviter »
Preuves à apporter pour justifier d'un trouble anormal du voisinage
- La notion de destination interprétée de manière souple
Ainsi, si le règlement de copropriété contient une clause d'habitation bourgeoise exclusive réservant l'immeuble à l'habitation, les juges pourraient juger que l'activité de location meublée touristique est interdite. Dans un arrêt du 27 février 2020, la Cour de cassation a, par exemple, confirmé l'interdiction des locations saisonnières dans une copropriété à destination bourgeoise en raison de la nature commerciale de l'activité. (Cour de Cassation 27 février 2020 n°18-14308) Il a également été jugé que si le règlement de copropriété contient une clause à destination bourgeoise mixte autorisant les activités libérales, alors l'activité de location meublée touristique peut également être sanctionnable car le règlement privilégiait le caractère résidentiel (Cour d'appel d'Aix en Provence 23 juin 2022 n°21-10914)
La notion de destination R151-27 et 28 CDU et le prochain PLU bioclimatique de la ville de Paris visent à freiner la location en meublé touristique. Ce PLU en cours de changement, arrêté du 5 juin 2023, enquête publique fin 2023, approbation fin 2024 début 2025 : La collectivité peut surseoir à statuer si l'autorisation demandée est susceptible de porter atteinte au PLU révisé. Le projet est accessible sur internet.
- Recommandations au syndic
Le syndic, en qualité de représentant du syndicat des copropriétaires, afin d'agir à l'encontre du propriétaire du lot dans lequel est exercé la location saisonnière, peut se faire accompagner par un avocat afin :
- D'analyser les clauses de règlements de la location saisonnière : les nouvelles règles applicables stipulant la destination de l'immeuble bourgeoise mais également certaines clauses restrictives (à l'instar de celle interdisant la location de meublés garnis, ou réservant la location aux personnes de bonnes mœurs) ;
- De faire les démarches auprès de la plateforme de location saisonnière pour vérifier le nombre de nuitées et le cas échéant le dépassement de la limite des 120 jours autorisés pour une résidence principale ;
- De préparer pour la prochaine assemblée générale une résolution d'information et une résolution soumise au vote à l'unanimité afin d'obtenir l'interdiction de se livrer à la location saisonnière.
- D'adresser un courrier aux copropriétaires et le cas échéant à la mairie ou la préfecture puis d'agir en justice afin de solliciter la cessation sous astreinte.
Ø CA Paris, pôle 4, ch. 2, 31 mai 2023, n° 22/18593